Un voyage au gré de l’écoute
Depuis plusieurs années, je voyage au gré des mois, des circonstances de vie, des émotions…
Je me laisse porter par les enseignements des 13 gardiennes, ces figures ancestrales qui détiennent une sagesse précieuse.
L’une d’elles, la cinquième gardienne, m’accompagne aujourd’hui. Elle est celle qui écoute.
Longtemps, j’ai cru qu’écouter et entendre étaient une seule et même chose.
Mais aujourd’hui, au cœur de la tempête, je saisis enfin leur différence.
Entendre est passif. C’est percevoir un son sans effort.
Écouter est un acte. C’est choisir de se rendre disponible.
L’art oublié de l’écoute profonde
Nos sens s’entrelacent, s’entrechoquent, se complètent. Voir, toucher, sentir… Tout cela vient perturber notre capacité à écouter pleinement.
Autrefois, les femmes qui voulaient retrouver l’art de l’écoute entraient en Tiyowhé.
Elles s’isolaient dans une grotte, plongées dans l’obscurité durant trois jours et trois nuits.
Sans distraction, elles s’immergeaient dans un monde fait de sons, de vibrations, d’infimes murmures.
Dans cet espace, elles apprenaient à se syntoniser avec une seule chose à la fois.
Dans ce silence choisi, l’écoute devenait un langage.
Aujourd’hui, en cet instant précis, je vis mon propre Tiyowhé.
Quand l’écoute devient nécessité
Le cyclone Garance est là.
Je suis enfermée chez moi, dans le noir, alors que dehors, il fait jour.
La lumière filtre à travers les naco opalescents, ces vitres qui laissent passer le jour sans dévoiler l’extérieur.
Mais je ne peux pas voir.
Alors, j’écoute.
🔹 J’écoute le vent qui rugit,
🔹 J’écoute les branches qui se brisent,
🔹 J’écoute les rafales qui s’engouffrent sous la terrasse,
🔹 J’écoute les objets qui tombent avec fracas.
Puis, un bruit plus proche.
Un choc brutal contre les volets roulants.
Mon cœur sursaute. Je ne sais pas ce que c’est.
Je ne peux pas voir. Je suis aveugle, pour un temps.
Alors, je continue d’écouter.
Je suis seule.
Seule avec les éléments.
Seule avec moi-même.
Écouter, une rencontre avec soi
Dans cette tempête, dans cet enfermement imposé, quelque chose se passe.
Le vacarme du cyclone est partout. Il emplit l’espace, il vibre dans l’air, il résonne sous ma peau.
Autour de moi, dans d’autres maisons, on se rassemble.
Les familles se regroupent, partagent des repas aux lueurs des bougies, jouent aux jeux de sociétés pour tromper l’attente.
Les voix se superposent au tumulte du vent, les éclats de rire s’opposent au fracas de la tempête.
Mais moi, je vis ce moment autrement.
Je suis seule.
Seule avec les éléments.
Seule avec moi-même.
Et pourtant, un autre silence s’installe en moi.
Je réalise que je ne suis pas seulement en train d’écouter le monde extérieur.
J’écoute aussi mon monde intérieur.
Écouter, ce n’est pas attendre le silence.
C’est entendre ce qui existe, même dans le tumulte.
Je ressens ce que le bruit masquait jusque-là :
🌿 Mes émotions en suspens.
🌿 Mes peurs encore vibrantes.
🌿 Les élans de mon âme que j’avais oubliés.
La tempête n’est pas seulement autour de moi.
Elle est aussi en moi.
Alors, j’attends.
J’écoute encore.
Poème de l’écoute
Écouter, ce n’est pas attendre le silence,
Mais plonger dans le bruit et l’accueillir.
C’est sentir le vent porter ses vérités,
C’est entendre la tempête sans s’y perdre.Écouter, c’est un ancrage, une présence,
Un regard tourné vers l’invisible,
Un murmure au creux du tumulte,
Un souffle qui se fraie un chemin.Alors j’écoute… et j’apprends.